Microtravailler, ça revient à essorer chaque journée de toutes les minutes disponibles, chercher à rendre productif chaque instant.
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Pourquoi on fait ça ?
Bien souvent, avec la meilleure des intentions : prendre « de l’avance » sur le lendemain en traitant les mails auxquels on peut répondre rapidement ; traiter les « urgences », arrivées par divers canaux (mails, fils WhatsApp, Slack, sms) ; dépanner un collègue ou son boss qui a besoin d’une réponse pour pouvoir avancer sur ses propres dossiers.
Mais ne nous leurrons pas, il y a aussi d’autres motivations à nos poussées de micro travail : montrer sa grande disponibilité à la hiérarchie (parce que c’est encore très valorisé, quoi qu’on en dise) ; nourrir l’image du·de la professionnel·le à responsabilités, donc indispensable et qui n’a pas une minute à perdre. Et alimenter ce sentiment de puissance à réussir à « tout gérer de front », telle une Shiva des temps modernes (avouez que vous le ressentez aussi parfois !).

S’il fallait prendre une métaphore, ce serait celle d’un virus qui s’immisce dans toutes les failles d’un système, ne laissant plus aucun espace libre. Virus, c’est un peu fort, et connoté négativement, à dessein. Je repense souvent à ma conversation avec Christophe André, le célèbre psychiatre, dans le cadre du Lab de Welcome to the Jungle. Quand je lui ai demandé ce que lui évoquait la notion d’équilibre vie pro vie/perso, sa réponse a fusé : « Les écrans. » Au début, je n’étais pas sûre d’avoir bien entendu, et il a précisé : « Ce sont eux, les grands outils diaboliques de cette confusion vie pro/vie perso. Imaginez s’il n’y avait pas d’ordinateur, pas de sms, pas de mails : une fois que vous partez du bureau, votre travail s’arrête automatiquement. » Ce sont bien nos outils digitaux qui permettent cette porosité, une porosité délétère pour nos niveaux de stress et d’anxiété, faut-il le rappeler…

Le micro travail, c’est donc la chasse au temps « perdu », au temps « mort ». Mais comment on décide ce qui est perdu ou mort ?

(…)  C’est dans les interstices, les temps d’entre-deux, d’attente, que l’on peut lever le nez et observer. S’étonner. Discuter. Il est désormais bien documenté que c’est comme ça que viennent les idées, que les problèmes  se résolvent, que des solutions se trouvent(…)

Mais au-delà de nous amputer de notre créativité, le micro travail reflète aussi une volonté de ne pas choisir, de ne pas trancher, et alimente notre illusion moderne collective que « tout peut rentrer » dans nos agendas sur sollicités, si seulement on est assez organisé· Quitte à sortir le chausse-pied plutôt que de réellement prioriser. Plus facile de tout concilier quand on peut annoter une présentation tout en encourageant son enfant au judo ? Pas du tout. On n’est en réalité ni en train de travailler, ni vraiment présent pour son enfant. Entre le micro travail et le multi-tâche, il n’y a qu’un cheveu, et Jean-Philippe Lachaux, Directeur de recherche à l’INSERM, nous rappelle que l’on ne peut pas réaliser correctement et en même temps deux tâches qui demandent de la concentration.

(…)

Il s’agit de s’emparer du sujet au niveau collectif, dans son équipe de travail par exemple. On résiste mieux à plusieurs, et on change mieux les comportements et habitudes que l’on nomme. On peut imaginer provoquer une conversation à l’occasion d’un point d’équipe, partager comment on vit le micro travail, l’éventuelle pression des pairs à répondre… pour avoir déjà eu ce type de conversations avec des équipes, c’est impressionnant de voir la pression retomber rapidement, et les comportements évoluer.

Alors, qu’allez-vous tester ?

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